– On m’a dit que tu jouis pendant tes douleurs. Comment est-ce possible ? .

– Pour les humains, la mort, c’est la douleur, et la vie, c’est la jouissance. Je suis un sadique qui exorcise la mort, donc la douleur par la vie, donc par la jouissance. Ton Prince n’arrive plus à jouir que dans ma souffrance. Ma souffrance est une bénédiction pour ma jouissance, ma consolation, mon inspiration, mon ivresse, ma musique, ma divinité, ma débilité, et mon art. C’est étrange comme toute la vie artistique de l’humanité est inspirée par la souffrance ! . Lorsque le bonheur se chante ses excréments dans l’éphémère, le malheur cherche sa substance pour se buriner dans l’éternité !. Ma montée aux enfers est gravée dans ces peintures primitives de Mésopotamie et d’Afrique Noire. Ma jouissance est l’expression de mon hurlement, de mon souffle, et de l’espoir de mon désespoir.

– Comment ne sens-tu pas les souffrances de maintenant ? .

– Je réside dans le passé et le futur. J’ai tué le temps, le temps du présent, le temps de l’action, le temps de la torture, le seul temps que les animaux conçoivent. Mais paradoxalement les animaux ne torturent pas. La torture, faire du mal pour le mal, est une création de l’homme ! . Elle n’existe nulle part ailleurs dans la nature. De même, l’homme fait le bien pour le bien, et c’est pour cela qu’il est transcendant ! . C’est vrai que le mal gouverne le présent de tous les passées, mais c’est la mémoire de ces passées qui nous apprend que seul le bien peut régner !. Lorsque la nature et la matière se taisent sur le mal, la conscience parle sur le bien ! .

– Mais les hommes pensent que le passé et le futur ne peuvent siéger, et que seul le présent est à vivre.

– Non, la réalité est que le présent est mort dès l’instant ou on a finit de parler. C’est une illusion qui est déjà dans le passé. Les hommes voulaient richesse, bonheur, et volupté, ils obtinrent tristesse, frustration et envie. Donc ils ont tué le temps dans ces trois dimensions. Le présent est abstrait, il n’est que la garde du passé, et un devenir futur qui va devenir passé. L’histoire n’est que la résurrection du passé sous une autre silhouette. Le présent n’est qu’une intersection imaginaire du passé avec le futur du passé. Mon but est de conserver le passé pour le faire revivre par ma pensée et non par une machine. Le temps est une durée que je prends en charge par ma mémoire. Mon futur est aussi dans mon passé. Mon passé est aussi dans mon futur, c’est pour cela qu’il change aussi sans cesse. Pour moi, le présent n’existe pas, je n’existe pas et tu n’existes pas ! .

– Mais je suis ! .

– Non ton être est, mais pas toi ! . La matière a un temps, mais le souffle est en dehors du temps.

– Le temps du présent te fait souffrir, c’est pour cela que tu refuses son existence. Mais si tu le perds, tu ne pourras même pas revivre ton passé.

– C’est vrai, le temps pour moi est la substance contenue dans la lumière qui traverse l’espace, le perdre dans la douleur me fait souffrir. Je souffre lorsque je dors et je rêve lorsque je souffre. Dieu qui a crée la souffrance n’a du le faire que pour le bien de l’humanité. Il n’y’ a que la Crucifixion que puisse donner la Rédemption !. Je suis triste que mon temps ne soit pas utilisé comme je le voudrais, alors je pars dans des rêves.